Les révélations autour du détournement présumé d’un montant de 21 millions de dollars et de 8 tonnes d’or à la BCRG (Banque centrale de la République de Guinée) défrayent toujours la chronique. Des politiques, juristes et acteurs de la société civile ne cessent de faire des commentaires dans la presse, malgré le démenti du premier ministre Dr Ibrahima Kassory Fofana et des hauts responsables de la BCRG.
D’ailleurs, le député Aboubacar Soumah évoque une situation de récidive : «Ce n’est ni le premier ni le second cas. Lorsqu’il y a eu le cas de saisie d’argent au Sénégal, l’Assemblée Nationale avait invité le gouverneur de la Banque Centrale et ses cadres. Ils nous ont fait comprendre que chaque semaine, et de manière régulière et normale, 20 millions de dollars quittaient la Guinée. Et que la société Emirat était chargée de transporter cet argent à Washington pour le mettre dans un compte bancaire de la Guinée. Selon eux, c’est avec cet argent que la Guinée allait faire ses transactions».
Poursuivant, le député uninominal de Dixinn qui a claqué la porte à l’UFDG estime que le parlement guinéen est entrain de fuir sa mission : « si l’Assemblée nationale était une Assemblée responsable, on aurait aussitôt mis en place une commission d’enquête parlementaire, ou une commission d’information parlementaire pour aller sur le terrain et commanditer un audit interne. Mais malheureusement, cela ne marche pas comme ça ».
Dans le même sillage, Dr Alhassane Makanéra Kaké a dénoncé ce qu’il qualifie de complot institutionnel avec l’inertie de l’Assemblée Nationale dans cette affaire : «Dès que la nouvelle est tombée, l’Assemblée Nationale devait automatiquement créer une commission d’enquête. Aller vérifier les allégations. Mais jusqu’à maintenant, l’Assemblée n’a pas bougé. Donc finalement, on peut même se poser la question de savoir si nous ne sommes pas arrivés à un complot des institutions contre la population».
Ce juriste qui n’a pas manqué de saluer le courage de la presse nationale qui a révélé l’information, a demandé le gouvernement d’apporter la preuve du contraire, s’il estime qu’il s’agit d’une simple allégation : « Je félicite la presse qui a porté à la connaissance des citoyens, la possibilité d’une évaporation pure et simple de l’argent du contribuable à la Banque. En Guinée, c’est regrettable. Si la banque Centrale ou le gouvernement déclare que ce n’est pas vrai, alors qu’ils nous apportent des preuves ». Mais au lieu de ça a-t-il déploré, « la Banque Centrale n’a donné aucune possibilité de vérification, pas de journée porte ouverte pour des citoyens afin de démentir techniquement et réellement ». « Un simple communiqué crée des soupçons surtout dans un pays où le détournement est entre-guillemet autorisé. Finalement, on croira à tout ce qu’on nous dit», a laissé entendre par voie de presse, le juriste Dr Makanera Kaké.
Si ce scandale fait de grincements des dents, la société civile de son côté veut qu’une lumière soit faite par la justice guinéenne. Par la voix de son président, la Cellule Balai Citoyen entend déjà porter plainte contre X. « Au niveau des 21 millions de dollars, nous porterons plainte dans les jours qui suivent contre X pour détournement de deniers publics. Mais aussi concernant les 8 tonnes d’or, nous sommes en train de formaliser les derniers détails afin que nous puissions assigner en justice tous ceux de près ou de loin qui étaient impliqués dans ce dossier », a indiqué Sékou Koundouno.
L’heure est aux poursuites judiciaires martèle l’activiste de la société civile, « parce que nous estimons que les crimes économiques sont imprescriptibles et la seule chose qui peut dissuader les gens et les prouver que nous ne sommes plus sous l’ère de la démagogie, de la tromperie ou de l’impunité systématique, c’est de les trimbaler devant les juridictions ».
« C’est une insulte que ceux qui gouvernent ce pays fassent en sorte que le gouvernement ait un patrimoine privé. Nous veillerons à ce que la souveraineté du peuple soit retrouvée », a rassuré Sekou Koundouno, président de la Cellule Balai Citoyen, arguant que : « le patrimoine est collectif. Le peuple de Guinée est l’employeur, monsieur Alpha Condé et tout son gouvernement sont des employés ».
Thierno Amadou Oury BALDE