LES MÉDIAS ET L’ELECTION DU 18 OCTOBRE
Dans quarante-huit heures, les guinéens choisiront leur nouveau président pour les cinq ou six prochaines années. Bien entendu, il n’y a pas un seul citoyen qui ne soit pas soucieux de la quiétude et de la stabilité du pays au lendemain de cette élection. Personne ne devrait souhaiter une crise électorale ou post-électorale quelle que soit son étiquette politique ou son appartenance ethnique. Car nul ne saurait prévoir les conséquences d’une crise liée à une élection ou d’une crise tout court.
Mais la condition de la paix dans le cadre d’une élection est sans conteste la transparence et la crédibilité de cette élection.
Les médias en particulier ont un grand rôle à jouer dans ce sens. Par le passé, ils ont pris une part active dans le déroulement des élections à travers en particulier la synergie des radios privées. Mais, très souvent, leur action s’est limitée à envoyer des reporters sur le terrain pour constater les conditions dans lesquelles les élections se passent, en ce qui concerne notamment l’heure d’ouverture et de fermeture des bureaux de vote, l’existence ou non d’une affluence au niveau des bureaux de vote, la présence du matériel électoral en quantité suffisante ou non etc.
Cette année, les médias devraient s’efforcer d’aller au-delà en s’impliquant davantage dans le processus et en aidant à ce que les résultats proclamés soient le reflet des suffrages exprimés par les électeurs. Et la manière la plus efficace de le faire est de procéder à la remontée systématique et en temps réel des résultats consignés dans les procès-verbaux au niveau des bureaux. Il ne s’agira pas pour les médias de faire la totalisation globale des votes et de proclamer des résultats. Cela relève de la compétence exclusive de la CENI tel qu’indiqué par les dispositions de l’article 162 du Code électoral révisé pour ce qui est des résultats provisoires . Les médias devraient se limiter tout simplement à rendre publics les procès-verbaux établis par les bureaux l’opération de dépouillement.
Une distinction très nette doit être faite entre les résultats d’un ou de plusieurs bureaux de vote dont chaque citoyen peut disposer puisqu’ils sont affichés dans la salle du bureau de vote et les résultats provisoires globaux. Ces derniers résultent de la totalisation des votes au niveau de l’ensemble des bureaux de vote de toutes les circonscriptions électorales.
Seul le Président de la CENI est habilité à publier ces résultats dits provisoires par opposition aux résultats définitifs qui sont proclamés uniquement par la Cour constitutionnelle. En principe, tout cela ne devrait pas de problème tant les dispositions légales y afférentes sont claires. Mais c’est la défiance vis-à-vis de la CENI et la Cour constitutionnelle qui suscite les polémiques.
Pour revenir à la publication des résultats partiels, ni la Constitution ni aucune loi organique encore moins le code pénal ne l’interdit.
Dès lors, les médias ont un choix à faire: soit ils se conforment à une interdiction qui n’a aucune base pour échapper à d’éventuelles descentes musclées dans leurs locaux ou à des sanctions qui de toute évidence seraient infondées soit ils prennent la décision de braver une interdiction illégale pour contribuer à sauver le pays d’une crise électorale ou post-électorale.
Me Mohamed Traoré