Le 22 octobre, la Chambre commune de justice et d’arbitrage (CCJA) a débouté l’Etat togolais dans le litige opposant ce dernier au groupe Accor. Selon les informations de Financial Afrik, la décision – connue depuis le 26 novembre – de la juridiction de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (Ohada) a cassé un arrêt de la cour d’appel de Lomé de 2015 validant l’expulsion du groupe français du pays un an auparavant. Cette décision rétablit non seulement Accor dans ses droits mais elle s’est greffée à une autre sentence de la CCJA qui, en février, avait confirmé la compétence de la Chambre de commerce internationale (CCI) de Paris pour traiter ce litige.
Au terme d’un appel d’offre international Accor avait été attributaire, en 1998 et pour 15 ans, de la gestion du Sarakawa, hôtel réputé de Lomé sur le littoral. Ce contrat avait été validé par décret présidentiel signé de Gnassingbé Eyadema. En 2013, le groupe hôtelier avait entamé les démarches pour renouveler sa convention via la Société togolaise d’investissement et d’exploitation hôtelière (STIEH), sa filiale locale. Mais l’absence de réponse des autorités togolaises pendant plusieurs mois, au-delà du terme du contrat, l’avait contraint à saisir la CCI, en mai 2014, pour réclamer une indemnité d’éviction. Une procédure conforme à l’article 12 de la convention de gestion concernant le règlement des litiges et l’instance compétente en la matière.
Un mois plus tard, coup de théâtre : le Togo saisissait en référé le Tribunal de Lomé puis, ultérieurement, la cour d’appel alors que la CCI n’avait pas encore statué sur cette affaire. Les juridictions locales débouteront Accor de sa demande d’indemnisation. Elles ordonneront par ailleurs son expulsion du pays invoquant le non-respect de son cahier des charges (dégradation, absence de réparation…).
Les deux sentences la CCJA rendue cette année dans cette affaire sont importantes en ce qu’elles peuvent constituer une jurisprudence concernant l’expulsion de groupes étrangers à l’image du cas de Veolia au Gabon, en 2018. Cette cour a reconnu l’incompétence de la justice togolaise pour interpréter cette convention de gestion sur le fond, a fortiori pour procéder à l’expulsion d’intérêts étrangers. Elle a par ailleurs externalisé un contentieux extrêmement sensible en dehors de l’espace Ohada, fort de dix-sept Etats membres. Défendu par le cabinet parisien Betto Perben Pradel Filhol, Accor a désormais toutelatitude pour faire valoir la condamnation du Togo par la CCI, fin 2017, à lui verser plus de 4 millions €.