Son discours est plus qu’évocateur et de mise en alerte du président de la République, Alpha Condé, qui commence sa nouvelle mandature dans la 4è République. Mohamed Lamine Bangoura, Président de la Cour Constitutionnelle, comme c’est de lui qu’il s’agit, a rappelé à Alpha Condé le mardi, 15 décembre les obligations qui découlent de ses fonctions de président de la République.
« Une épée de Damoclès doit être suspendue et prête à trancher le nœud gordien de la mal gouvernance, incarnée par certains hauts commis de l’Etat. Gouverner autrement, c’est mettre fin à la corruption, à l’incivisme et à l’incivilité. Gouverner autrement, c’est davantage de rigueur, d’efficacité, d’efficience dans l’action gouvernementale, c’est choisir les compétences d’où qu’elles viennent. Gouverner autrement, enfin, c’est plus de transparence, de responsabilité, de reddition des comptes, d’imputabilité. Dans la perspective de mise en place des nos nouvelles institutions, on ne pourrait faire l’impasse sur celle relative à la Haute Cour de Justice », a indiqué le président de la Cour Constitutionnelle dans un long discours dont voici les grandes lignes .
De la prestation de serment aux obligations des fonctions de président de la République
Le constituant guinéen a soumis les personnalités de certaines institutions constitutionnelles à des devoirs ou des obligations mentionnées dans leur serment pour l’exercice de leur fonction compte tenu de leur mission et de leur importance. Parmi ces institutions figure le président de la république. Ce jour de votre prestation de serment et votre seul jour de gloire mais tous les autres jours seront des jours de labeur constant (…). Solennellement, vous venez de prêter serment prescrit par les dispositions de l’article 48 de la constitution, en jurant devant le peuple de Guinée et sur votre honneur de respecter et de faire respecter scrupuleusement les dispositions de la constitution, des lois et décisions de justice, de défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité territoriale et l’indépendance nationale, en cas de parjure que vous subissez les rigueurs de la loi.
Le premier élément de ce rituel est de dire haut et fort et de faire savoir urbi et orbi que le peuple de Guinée que vous incarnez pendant les prochaines années vous a choisi comme le premier président de la 4ème république, il demeure le seul et unique détenteur du pouvoir, il lui donne à qui il veut. Digne représentant du peuple de Guinée, vous incarnerez l’Etat de droit que vous êtes tenus de respecter et de faire respecter par l’obéissance de toute personne à l’autorité de la loi et aux décisions de justice. Force doit rester à la loi, nul n’est au-dessus de celle-ci.
En outre puisque le président de la république est la clé de voûte de la vie institutionnelle et républicaine, chef suprême des armées, vous êtes dorénavant astreint à défendre les institutions constitutionnelles énumérées à l’article 4 de la constitution, l’intégrité du territoire ainsi que l’indépendance nationale en assurant le caractère unitaire de la République de Guinée. Enfin vous êtes tenus au respect de l’article 49 de la constitution relatif à la déclaration écrite sur l’honneur de vos biens en début et en fin de mandat.
Le deuxième élément de votre serment est indissociable au premier, il concerne aux manquements de vos obligations prescrites dans votre serment.
Monsieur le président de la république, de toutes les vertus qu’un président doit incarner au cours de son mandat, la plus capitale et la plus nécessaire demeure sans nul doute, la loyauté envers son peuple pour répondre à ses préoccupations quotidiennes. Vous avez déjà déployez beaucoup d’efforts, élaborez et mis en œuvre des politiques publiques, des programmes et projets dans tous les secteurs pour le mieux-être de vos concitoyens. Mais les bilans aussi élogieux vous obligent encore à relever d’autres défis aussi contraignants que les uns que les autres. Notamment remédier aux maux dont souffrent la justice aux fins d’une justice sociale, fournir à la moindre chaumière de notre pays les fondamentaux d’une vie normale : l’eau et l’électricité. Permettre à chaque guinéen de s’instruire et de se soigner à moindre coût, faciliter la circulation des personnes et de leurs biens entre les différentes régions du pays, faire en sorte que le gain du pain quotidien cesse d’être l’obsession de chacune et de chacun de nos concitoyens, favoriser l’auto-emploi des jeunes et des femmes par la mise en place des dispositifs appropriés dans tous les secteurs, permettre aux retraités de vivre décemment par la valorisation de leur pension de retraite.
Ce sont là monsieur le président de la république, les attentes légitimes du peuple de Guinée pour mener à bon port une république réellement émergeante dont les objectifs ont été déclinés dans le plan national du développement économique et social et dans votre programme de gouvernance endossé au slogan ‘’la prospérité partagée’’. Le peuple de Guinée aspire à un ardant désir de changement. Il rêve d’une autre gouvernance basée sur le respect de la loi par tous, de la gestion transparente des deniers publics, de la lutte contre la corruption, de l’enrichissement illicite, des conflits d’intérêts et infractions assimilés. Aujourd’hui c’est vous que le peuple de Guinée a choisi pour présider à sa destinée, ce peuple dans sa diversité culturelle et linguistique doit constituer désormais le lien géométrique de toutes vos occupations et préoccupations de tous les instants.
‘’Gouverner autrement’’ ce n’est ni un slogan, mais un état d’esprit
Le peuple de Guinée mobilisé à vous applaudir, ses acclamations seront non seulement de l’expression de ses encouragements, félicitations mais aussi dans l’engagement que vous avez pris de gouverner autrement. Dans la mesure où vous avez dit, ‘’gouverner autrement’’ ce n’est ni un slogan, mais un état d’esprit. Gouverner autrement, veut notamment dire : aucune tolérance à la corruption, au copinage, à l’ethnocentrisme, clientélisme. Oui monsieur le président, pour gouverner autrement, il est important de s’astreindre à faire peau neuve. Une épée de Damoclès doit être suspendue et prête à trancher le nœud gordien de la mal gouvernance, incarnée par certains hauts commis de l’Etat.
Gouverner autrement, c’est mettre fin à la corruption, à l’incivisme et à l’incivilité. Gouverner autrement, c’est davantage de rigueur, d’efficacité, d’efficience dans l’action gouvernementale, c’est choisir les compétences d’où qu’elles viennent. Gouverner autrement, enfin, c’est plus de transparence, de responsabilité, de reddition des comptes, d’imputabilité. C’est pourquoi, dans la perspective de mise en place des nos nouvelles institutions, on ne pourrait faire l’impasse sur celle relative à la Haute Cour de Justice. Oui monsieur le président, la Guinée ne peut gravir l’échelle du développement qu’à l’aide d’un capital humain et d’un environnement institutionnel, favorable à l’investissement, de la création et à l’innovation (…).
Nous sommes persuadés que vous allez gouverner autrement, c’est-à-dire que vous allez décupler tout ce que vous avez fait de bon et de bien pour la république de Guinée, en même temps sur le plan national de développement économique et social et dans votre programme de gouvernance endossé au slogan, ‘’la prospérité partagée’’. D’ailleurs, peut-on parler de prospérité partagée si certains s’adjugent au mépris de toute décence les maigres ressources et les autres biens de l’Etat qui demeurent notre patrimoine commun ? Nous répondons bien évidemment non.
Le peuple de Guinée aspire à un grand changement et rêve d’une autre gouvernance basée sur le respect de la loi par tous, de la gestion transparente des deniers publics, de la lutte contre la corruption, de la collusion et de l’enrichissement illicite insolent, des conflits d’intérêts et infraction assimilée.
Aujourd’hui, c’est vous le peuple de Guinée a choisi pour présider à sa destinée, ce peuple, dans sa diversité culturelle et linguistique, doit constituer désormais, le lien géométrique de toutes vos occupations et préoccupations de tous les instants. Dans sa soif de développement socio-économique, il attend de vous, davantage de prospérité, de bonheur, du progrès durable et inclusif.
Les Guinéens dans leur majorité, souhaitent que les leaders politiques, de la société civile saisissent la main tendue que vous daignerez à leur tendre, pas forcément pour aplanir la divergence, mais surtout qu’ils comprennent que c’est avec eux aussi que la Guinée, notre Guinée, leur Guinée se hissera lentement et surement. C’est tout le sens de notre appel au dialogue politique et social. (…) le dialogue permanent est le vaccin de tout conflit.
Monsieur le président de la république, tout nous dit que tout peut aller vite et mieux, le chantier est certes vaste, mais les augures sont fastes, le ciel s’éclaircit, l’horizon aussi. La république de Guinée, dans sous peu de temps, sous votre conduite éclairée deviendra l’une des nations émergentes du continent. Vous l’avez prédit, nous y croyons, c’est sur ces mots plein d’espoir que la Cour Constitutionnelle par ma voix, vous souhaite bonne chance, beaucoup de succès pour parvenir à combler les attentes du peuple de Guinée“.