Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) a dénoncé la répression croissante des figures de l’opposition par le gouvernement en Ouganda. Peu avant les élections présidentielle et parlementaires du 14 janvier, les rapports sur les violations des droits de l’homme dans ce pays d’Afrique de l’Est ont augmenté, a déclaré, vendredi, la porte-parole du Haut-Commissariat, Ravina Shamdasani.
Les services de la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, s’inquiètent notamment des restrictions à l’espace démocratique, qui se sont multipliées depuis le début de la campagne électorale en novembre 2020. Et parfois, Kampala a abusé des mesures visant à contenir la pandémie de Covid-19 pour faire taire les voix dissidentes.
« Ces développements font craindre que les mesures anti Covid-19 soient utilisées comme motif pour restreindre les libertés publiques et la participation politique pendant le processus électoral », a déclaré Mme Shamdasani lors d’un point de presse à Genève. L’ONU s’inquiète notamment du fait que l’application discriminatoire de certaines « restrictions a entraîné des violences, des arrestations et des détentions arbitraires et, dans certains cas, des rapports de torture et de mauvais traitements par les forces de sécurité ».
Harcèlement visant les défenseurs des droits humains, les journalistes et les opposants
D’une manière générale, le HCDH est préoccupé par « la détérioration de la situation des droits de l’homme en Ouganda à l’approche des élections et par les défis que cette situation pourrait poser non seulement pour le jour du scrutin lui-même, mais aussi pour la période post-électorale ».
Selon l’ONU, la période de campagne électorale a été marquée par un usage excessif de la force par les forces de l’ordre, qui a entraîné des meurtres et des blessures parmi les civils. Entre le 18 et le 20 novembre, au moins 54 personnes ont été tuées lors d’émeutes et de manifestations dans au moins sept districts du pays, à la suite de l’arrestation et la détention de deux candidats à la présidence de l’opposition, Robert Kyagulanyi, également connu sous le nom de Bobi Wine, et Patrick Oboi Amuriat, ainsi que de membres de l’opposition politique.
Plusieurs incidents de harcèlement visant les défenseurs des droits humains, les journalistes et les opposants politiques se sont produits depuis le début des campagnes électorales. « Le harcèlement, les mauvais traitements, les arrestations et les détentions arbitraires des candidats et des partisans de l’opposition ont constitué une évolution inquiétante pendant la campagne électorale », a ajouté Mme Shamdasani.
A ce sujet, elle cite le sort de l’opposant Kyagulanyi empêché à plusieurs reprises de mener sa campagne. Parmi les incidents récents, il y a l’arrestation de l’opposant Oboi Amuriat. Arrêté le 2 janvier dans le district de Nakasongola, le candidat du Forum pour le changement démocratique (FDC) a été finalement libéré sous caution le même jour. Mais les journalistes qui couvraient sa campagne auraient été battus par les forces de sécurité et auraient reçu l’ordre de supprimer des vidéos et des photos.
L’ONU prône un scrutin libre et pacifique
Plus largement, « nous avons observé que les restrictions dues à la Covid-19 avaient progressivement été mises en œuvre de façon plus stricte pour réduire les activités de la campagne électorale de l’opposition d’une façon discriminatoire », a relevé Mme Shamdasani.
Par exemple, le 30 décembre dernier, 90 partisans de l’opposition ont été arrêtés pour violation des mesures liées à la lutte contre le coronavirus à Kalangala. Lors de leur comparution devant le tribunal, certains ont présenté des blessures résultant, selon eux, de tortures subies pendant leur détention. « En revanche, la police n’a pas appliqué les restrictions à la Covid-19 de manière aussi stricte pour les activités de campagne électorale du parti au pouvoir », a fait remarquer la porte-parole du HCDH.
À la lumière des directives présidentielles sur le coronavirus publiées le 18 mars dernier, la Commission électorale de l’Ouganda a publié trois mois plus tard, une nouvelle feuille de route révisée pour les élections générales. Celle-ci interdit les rassemblements de masse pendant les campagnes électorales et mise sur des campagnes électorales numériques.
La règle a ensuite été révisée pour permettre des réunions de campagne avec un maximum de 70 puis de 200 personnes. Mais le 26 décembre, la commission électorale a suspendu les réunions de campagne électorale dans 16 districts classés comme « zones de transmission élevée ».
Face à toutes ces restrictions, le HCDH invite les autorités ougandaises à protéger les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Pour l’ONU, il s’agit « d’assurer un processus électoral libre et pacifique qui garantisse le droit du peuple ougandais à participer aux affaires publiques de son pays, notamment en prenant des mesures pour prévenir les cas de violence électorale ».
ONU info