Michael Lynk, Rapporteur spécial des Nations Unies

Un expert indépendant de l’ONU a appelé, lundi, Israël à annuler ses ordres d’expulsion de familles palestiniennes vivant à Jérusalem-Est occupée, les considérant comme faisant partie « d’un schéma alarmant visant à changer la démographie de la ville ».

« Nous pensons que l’un de leurs objectifs (de ces expulsions) est la création d’une majorité juive à Jérusalem-Est occupée, afin d’établir des faits démographiques sur le terrain qui confirmeraient l’annexion illégale d’Israël sur cette partie de la ville », a déclaré dans un communiqué, Michael Lynk, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967.

Au cours des derniers mois, les tribunaux israéliens ont confirmé les ordres d’expulsion de 16 familles palestiniennes de leurs maisons dans les quartiers de Sheikh Jarrah et de Silwan. Il s’agit de plusieurs familles élargies et de deux femmes élevant seules leurs enfants. Dans la plupart des cas, les familles palestiniennes vivent dans leurs maisons depuis des décennies en tant que propriétaires ou locataires à long terme.

Ces expulsions sont extrêmement alarmantes et semblent s’inscrire dans un schéma plus large consistant à forcer les familles palestiniennes de Jérusalem à quitter leur maison pour ouvrir la voie à d’autres colonies israéliennes illégales

En attendant, des quartiers palestiniens historiques tels que Sheikh Jarrah et Silwan disparaissent progressivement ou sont complètement entourés et isolés par les colonies israéliennes, avec ces ordres d’expulsions, de démolitions de maisons et d’expansion des colonies.

« Les ordres d’expulsion ne sont pas aléatoires mais semblent se concentrer stratégiquement sur une zone de Jérusalem-Est connue sous le nom de Bassin historique », a dénoncé M Lynk, relevant que ces expulsions semblent viser « à ouvrir la voie à l’établissement de plus de colonies israéliennes illégales dans la zone et à séparer et fragmenter physiquement Jérusalem-Est du reste de la Cisjordanie ».

Plus de 800 personnes, dont près de 400 enfants menacées d’expulsion

D’une manière générale, les demandes d’expulsions par des organisations de colons se sont intensifiées. A ce sujet, il cite des rapports du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires qui montrent que 877 personnes, dont 391 enfants, risquent actuellement d’être expulsées de force en raison de ces poursuites. Les expulsions à Jérusalem-Est ont déjà touché des centaines de familles palestiniennes, en particulier dans les quartiers de la vieille ville, de Sheikh Jarrah et de Silwan.

Le litige le plus récent a été initié par des organisations de colons qui cherchent à faire appliquer les dispositions d’une loi israélienne qui permet aux Juifs israéliens de déposer des plaintes à Jérusalem-Est pour des propriétés qui pourraient avoir appartenu à des familles juives avant 1948. Or selon l’expert, la loi israélienne ne permet pas aux Palestiniens de faire des demandes similaires pour des propriétés familiales en Israël.

Les deux organisations israéliennes qui ont intenté de nombreuses poursuites pour expulsion, Nahalat Shimon et Ateret Cohanim, fonctionnent à la fois comme des sociétés de propriété foncière et des associations de colons. « Les derniers ordres d’expulsion, s’ils étaient exécutés, équivaudraient à une violation par Israël, la puissance occupante, de l’interdiction du transfert forcé de la population protégée en vertu de l’article 49 de la quatrième Convention de Genève », a fait valoir M. Lynk.

Plus largement, l’expert des Nations Unies a rappelé « la responsabilité importante de la communauté internationale. « En vertu de la quatrième Convention de Genève, elle doit veiller à ce qu’Israël respecte pleinement ses obligations en vertu du droit international, y compris à Jérusalem-Est », a-t-il conclu.