Une réduction drastique du plastique inutile, évitable et problématique est cruciale pour résoudre la crise de la pollution mondiale, selon une évaluation publiée jeudi par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE).
Une transition accélérée des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables, la suppression des subventions et le passage à des approches circulaires permettront de réduire les déchets plastiques à l’échelle nécessaire, a souligné le PNUE.
« Cette évaluation fournit l’argument scientifique le plus solide à ce jour pour souligner l’urgence d’agir, et pour la mise en œuvre de mesures collectives visant à protéger et restaurer nos océans de la source à la mer », a déclaré Inger Andersen, Directrice exécutive du PNUE.
La menace est en hausse
De la pollution à la solution : une évaluation mondiale des déchets marins et de la pollution plastique (From Pollution to Solution: a global assessment of marine litter and plastic pollution) montre que la menace est en hausse dans tous les écosystèmes, de la source aux océans.
L’évaluation montre également que bien que nous disposions du savoir-faire, une volonté politique et une action urgente des gouvernements sont nécessaires pour faire face à cette crise croissante. Le rapport alimentera les discussions lors de l’Assemblée des Nations Unies pour l’environnement en 2022, au cours de laquelle les pays se réuniront pour décider de la marche à suivre en matière de coopération mondiale.
La pollution plastique qui pénètre dans les écosystèmes aquatiques a fortement augmenté ces dernières années et devrait être multipliée par deux d’ici à 2030, avec des conséquences désastreuses pour la santé humaine, l’économie mondiale, la biodiversité et le climat.
L’évaluation, publiée dix jours avant le début de la Conférence des Nations Unies sur le climat, COP26, souligne que les plastiques constituent également un problème climatique : sur la base d’une analyse du cycle de vie, les émissions de gaz à effet de serre dues aux plastiques s’élevaient en 2015 à 1,7 gigatonne d’équivalent CO2 (Gt éq CO2), et devraient atteindre environ 6,5 Gt éq CO2 d’ici à 2050, soit 15% du budget carbone mondial.
Des solutions qui n’en sont pas
Les auteurs mettent en doute la solution du recyclage comme moyen de parvenir à sortir de la crise de la pollution plastique.
Ils mettent en garde contre les alternatives néfastes aux produits à usage unique et autres produits en plastique, comme les plastiques biosourcés ou biodégradables, qui représentent actuellement une menace chimique similaire à celle des plastiques conventionnels.
Le rapport examine les défaillances cruciales du marché, telles que le faible prix des matières premières fossiles vierges par rapport aux matériaux recyclés, les efforts non coordonnés dans la gestion informelle et formelle des déchets plastiques, et l’absence de consensus sur les solutions au niveau mondial.
« Les effets et les solutions pour traiter les débris de déchets plastiques, tels que les microplastiques et les additifs chimiques, dont on sait qu’ils sont souvent toxiques et dangereux pour la santé de l’homme et de la faune, ainsi que pour les écosystèmes, est une préoccupation majeure », a souligné Mme Andersen.
L’ensemble de la vie marine menacée
Le rapport souligne que le plastique représente 85% des déchets marins et prévient que d’ici à 2040, les volumes de pollution plastique qui se déversent dans les zones marines vont presque être multipliés par trois, ajoutant 23 à 37 millions de tonnes métriques de déchets plastiques dans l’océan par an. Cela représente environ 50 kg de plastique par mètre de côte dans le monde.
Par conséquent, l’ensemble de la vie marine, qu’il s’agisse du plancton, des crustacés, des oiseaux, des tortues et des mammifères, est exposée à un risque grave de toxicité, de troubles du comportement, de famine et de suffocation.
Les coraux, les mangroves et les herbiers marins sont également étouffés par les déchets plastiques qui les empêchent de recevoir l’oxygène et la lumière dont ils ont besoin.
Impacte néfaste pour les humains et les économies
Le corps humain est également vulnérable à de multiples égards à la pollution plastique des sources d’eau, capable de provoquer des changements hormonaux, des troubles du développement, des anomalies de la reproduction et des cancers. Les plastiques sont ingérés par le biais de la consommation de fruits de mer, de boissons et même le sel de table et peuvent alors pénétrer à travers la peau et être inhalés lorsqu’ils sont en suspension dans l’air.
Les déchets marins et la pollution plastique ont également des effets considérables sur l’économie mondiale. Les coûts économiques de la pollution plastique marine, comme par exemple ses effets sur le tourisme, la pêche et l’aquaculture, ainsi que d’autres coûts tels que ceux des opérations de nettoyages, ont été estimés en 2018 à 6 à 19 milliards dollars en 2018 dans le monde. On prévoit que d’ici à 2040, les entreprises courent un risque financier annuel à hauteur de 100 milliards de dollars si les gouvernements exigent qu’elles couvrent les coûts de gestion des déchets en fonction des volumes et de possibilités de recyclage.
Les niveaux élevés de déchets plastiques peuvent également entraîner une augmentation de l’élimination illégale des déchets au niveau national et international.
Des approches circulaires
L’évaluation exhorte une réduction immédiate des plastiques et encourage une transformation de l’ensemble de la chaîne de valeur des plastiques.
Des investissements supplémentaires doivent être réalisés dans des systèmes de surveillance beaucoup plus robustes et efficaces pour identifier les sources, l’échelle et le devenir du plastique, ainsi que dans le développement d’un cadre de risque, qui fait actuellement défaut au niveau mondial.
En fin de compte, il est essentiel de passer à des approches circulaires, comme des pratiques de consommation et de production durables, une accélération du développement et de l’adoption d’alternatives par les entreprises et une sensibilisation accrue des consommateurs pour permettre des choix plus responsables.
Pour la cheffe du PNUE, « la vitesse à laquelle la pollution plastique des océans retient l’attention du public est encourageante ». « Il est essentiel que nous profitions de cet élan pour nous concentrer sur les possibilités de créer des océans propres, sains et résilients », a conclu Mme Andersen.
ONU Info