Le 5 Septembre 2021, les guinéens dans leur grande majorité ont salué la prise du pouvoir par le Comité National du Rassemblement pour le Développement après une décennie de gouvernance dont le bilan en termes de violations des droits de l’Homme place la Guinée au banc des accusés par les organisations internationales ce, à cause des assassinats, arrestations arbitraires, tortures, détentions illégales, pillages de biens publics et privés, restrictions des libertés publiques qui ont caractérisé le régime du Président Alpha Condé.

Après onze (11) mois, les guinéens renouent avec les violences à cause des incompréhensions entre les acteurs sociopolitiques autour de sujets portants, entre autres, sur la durée de la transition, le chronogramme de la transition, l’identité des membres du Conseil National pour le Rassemblement et le Développement (CNRD), un dialogue sincère et inclusif, le tout dans le respect des lois de la République.

Le Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), un mouvement de la société civile et fer de lance des contestations en cours dans notre pays a été dissout par le Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (FNDC), ce, en violation des articles 19, 20,21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16- décembre 1966, dispositions qui consacrent la liberté d’opinion, d’association et de manifestation.

 

Cette situation a été suivie de discours teintés d’invectives entre les membres du Front National pour la Défense de la Constitution et certains membres du Gouvernement de Transition, chose qui ne contribue pas à l’apaisement dans un contexte très fragile.

Face aux tensions en cours dans le pays, la Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale Internationale (CGCPI) note de graves violations des droits de l’homme de la part de certains agents des forces de l’ordre à travers un usage excessif de la force, d’une part, et, d’autre part, des comportements inciviques de certains citoyens civils, qui s’attaquent à des biens publics et privés. Des journalistes sont même parfois pris à partie dans l’exercice de leur fonction.

Si les exactions de la part de certains agents des forces de l’ordre ne sont pas un fait nouveau, la Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale Internationale constate, avec regret et amertume, l’utilisation de la torture et de la concussion pare certains agents des forces de l’ordre, au niveau de certains commissariats de police et d’escadrons mobiles.

La Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale Internationale a été saisie par des victimes d’abus sur ces méthodes utilisées par les forces de défense et de sécurité sur des citoyens qui sont arrêtés pendant les manifestations. Il s’agit de l’usage de fouets, de bâtons, de fils électroniques pour frapper des citoyens mais aussi d’injures grossières accompagnées de propos aux relents ethniques chez certains hommes en uniforme.

Pourtant la Guinée a signé et ratifié la Convention Internationale contre la torture du 10 décembre 1984 qui a été internalisée dans le nouveau code pénal guinéen révisé du 26 octobre de 2016, en ses articles 232 à 238. C’est ainsi, l’article 232 du code pénal dispose expressément que : « Aux fins de la présente section :

  1. le terme torture désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aigues, physiques ou mentales sont intentionnellement infligées à une personne aux fins, notamment, d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne, des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite ;
  2. le traitement cruel et inhumain consiste dans le fait pour une personne investie de l’autorité publique ou son préposé de soumettre une personne placée sous sa responsabilité ou confiée à sa garde :
  3. à des coups, l’imposition des chocs électriques ou de brûlure, la suspension par les bras ou les pieds, le viol, l’agression sexuelle ou la menace de viol ou d’agression sexuelle, les exécutions simulées;
  4. à des punitions qui portent atteinte à la santé mentale ou physique de celle-ci ;
  5. au recours à des chaînes, à des cordes ou à des fers utilisés soit comme punition ou comme moyen d’entrave ou de contrainte ;
  6. à l’utilisation de menottes, de fers, de chaînes aux pieds ou de camisoles de force comme punition ;
  7. à des positions physiques lui causant des douleurs insupportables ;
  8. à l’utilisation de faux documents pour lui arracher un aveu ;
  9. à l’isolement pendant une durée pouvant dépasser 3 jours ;
  10. à la privation totale de lumière, de tout contact et de sons ;
  11. à l’interrogatoire dans des lieux ou positions lui causant des troubles physiques ou psychiques ;
  12. au port d’une cagoule par le détenu pendant l’interrogatoire et les déplacements ;
  13. au recours à des interrogatoires de 12 heures sans interruption ;
  14. à la privation de tout accessoire personnel d’hygiène ou de prière ;
  15. à la privation de vêtements et/ou la nudité forcée ;
  16. à la privation de repas ;
  17. au fait d’imposer le rasage de la barbe et des cheveux ;
  18. à l’utilisation des phobies du détenu et tout moyen ou artifice pour générer la peur;
  19. à la menace du détenu ou des membres de sa famille de mort ou de graves souffrances imminentes ;
  20. à l’exposition au froid, à la chaleur et à l’eau provoquant la suffocation ou simulant de noyade ;
  21. à l’utilisation des pressions physiques d’intensité moyenne ;
  22. et à tout autre acte équivalent ; ».

S’agissant de la concussion, il faut rappeler que cette infraction est prévue et punie par les articles 655 et suivants du code pénal. En la matière, l’article 655 du code pénal énonce clairement que : « La concussion est le fait pour un agent public de percevoir ou de recevoir des sommes qu’il sait ne pas être dues par celui ou ceux qui les lui ont versées».

C’est pourquoi, la Coalition Guinéenne pour la Cour Pénale Internationale

  • Invite Messieurs les procureurs de la République près les Tribunaux de première instance et procureurs généraux près les deux Cours d’appel de Conakry et de Kankan à mettre en place un système de surveillance dans les commissariats et escadrons mobiles lors des manifestations sociopolitiques ;
  • Appelle le Haut-Commandement de la Gendarmerie Nationale et de la Justice Militaire et la Direction Nationale de la Police à sanctionner, sur le plan disciplinaire, les policiers et gendarmes qui se livrent à des actes de tortures et de concussion pendant les manifestations sociopolitiques ou autres ;
  • S’engage à accompagner les victimes, devant les juridictions compétentes, contre les présumés auteurs d’actes de torture et de concussion de citoyens lors des manifestations sociopolitiques ou autres;
  • Demande au Gouvernement guinéen d’œuvrer pour un dialogue inclusif et sincère, afin d’une transition apaisée et réussie ;

 

Conakry, le 24 août 2022

 

Pour le Bureau Exécutif National

Le Président

Maitre Hamidou BARRY