Aujourd’hui, je lance le nouveau document de politique générale de mon Bureau à propos du crime de persécution liée au genre. Ce document servira de cadre à la lutte contre l’impunité pour ce qui est des crimes sexuels et liés au genre. Le lancement de cette initiative est, selon moi, une étape importante vers la réalisation de mon engagement à répondre plus systématiquement et plus efficacement aux crimes sexuels et liés au genre.

 

Si nous voulons rendre justice aux victimes et briser enfin le cycle des violences liées au genre, nous devons commencer par bien saisir la nature des discriminations à l’origine de ces actes odieux et avoir pleinement conscience de la complexité des différentes formes de victimisation. Ce n’est qu’en ayant bien compris tout cela que nous pourrons faire prévaloir l’obligation de rendre des comptes à l’égard du crime contre l’humanité que constituent les persécutions liées au genre, au regard du Statut de Rome. Je suis fermement résolu à faire en sorte que mon Bureau prenne systématiquement en compte les crimes sexuels et liés au genre et adopte une démarche plus approfondie et ciblée dans ses enquêtes et ses poursuites à propos des persécutions liées au genre. Cette toute nouvelle initiative de politique générale est le reflet de notre engagement et nous rapproche un peu plus de cet objectif impératif.

Cette nouvelle politique privilégie une approche globale à l’égard des crimes sexuels et liés au genre susceptibles de constituer le crime contre l’humanité de persécution en raison du genre (persécution liée au genre). Elle englobe toutes les catégories de victimes, aussi bien les femmes et les filles que les hommes et les garçons et les personnes de la communauté LGBTQI+. Elle tient également compte du fait que parmi les actes et les crimes de persécution liée au genre figurent différentes formes de violences sexuelles et toute autre violence ou contact physique, même si les faits en cause ne se manifestent pas nécessairement sous cette forme. Dans cette catégorie, peuvent également s’ajouter les violences psychologiques. Les persécutions peuvent également se manifester sous d’autres formes que les souffrances physiques infligées aux personnes, notamment des actes tels que la destruction du patrimoine culturel, la confiscation de biens culturels ou l’interdiction de la scolarisation des filles.

L’obligation de rendre des comptes concernant les crimes de persécution liée au genre peut contribuer à freiner la banalisation des discriminations et des violences faites en raison du genre entrées dans les mœurs. Au travers de la promulgation de cette politique, mon Bureau fait part de son engagement à dûment rendre compte de faits de cette nature et affirme sa détermination à en apporter la preuve dans toutes les affaires qu’il traitera à l’avenir. Pour ce faire, lorsqu’il y aura lieu, il formulera des accusations de persécution liée au genre ou de persécution pour tout autre motif. Dans cette optique, je veillerai personnellement à la bonne mise en œuvre de cette politique.

Je souhaite remercier tout particulièrement Mme Lisa Davis, ma conseillère spéciale pour les persécutions liées au genre qui, à ma demande, a dirigé la rédaction de cette politique générale qui s’inscrit dans le prolongement du Document de politique générale relatif aux crimes sexuels et à caractère sexiste paru en 2014. Cette nouvelle politique contribuera à la lutte contre l’impunité, tout en favorisant la transparence et la lisibilité de l’action du Bureau sur cette importante question. Le Bureau s’est déjà engagé sur cette voie en obtenant la confirmation du chef d’accusation de persécution pour des motifs liés au genre (et religieux) dans l’affaire Le Procureur c. Al Hassan.

Il est à mon sens fondamental que cette politique tienne compte des opinions exprimées par le personnel du Bureau et les acteurs externes, notamment celles et ceux qui possèdent déjà une expérience précieuse de la lutte contre les violences liées au genre. Il est très important que nous cherchions à nous faire l’écho des victimes de ces crimes dans notre nouvelle approche. S’appuyant sur mon initiative visant à renforcer les échanges avec la société civile, l’élaboration de cette politique s’est inscrite dans le cadre d’une année de processus consultatif auquel ont participé des membres du personnel, de la société civile et des communautés touchées. Je tiens à remercier les organisations, institutions, États, experts de l’ONU, experts indépendants, militants, survivants, chercheurs et universitaires – plus de 500 au total , représentant plus d’une centaine de pays et de territoires, de nous avoir fait part de leurs observations. Leurs commentaires témoignent de l’importance de cette politique.

Je ne doute pas que cette nouvelle approche contribuera à accroître la transparence, la clarté et la lisibilité de l’action du Bureau dans l’application du cadre juridique. Je me réjouis à la perspective d’amorcer les prochaines étapes qui nous amènerons à étendre notre coopération, à faire prévaloir le principe de responsabilité pour les persécutions liées au genre, et à renforcer l’effet préventif du Statut de Rome à l’égard des crimes liés au genre.

Avec la CPI