Alpha Condé, PRG

Alors qu’Alpha Condé a décidé, contre vents et marées, de maintenir l’organisation du double scrutin référendaire et législatif contesté, la menace de sanctions ciblées contre ceux qui l’organisent ou le soutiennent se précise au sein de l’Union Européenne, aux États-Unis et, peut-être, à l’Union Africaine.

Ce 22 mars, Alpha Condé a décidé d’organiser des élections législatives et un référendum contestés par une grande majorité de Guinéens et par l’ensemble de la communauté des États voisins et internationaux. Ce double scrutin critiqué pour son manque total d’inclusivité, de transparence et d’équité, pourrait amener l’Union Européenne, les États-Unis, l’ONU et, pourquoi pas, l’UA, à mettre en place des sanctions individuelles ciblées drastiques contre les acteurs politiques et économiques guinéens qui le soutiennent et l’organisent.

CEDEAO, UE, UA, ONU, USA, Nigeria au front

Rares sont les scrutins qui peuvent rassembler autant d’adversaires. Les 20 et 21 mars 2020, l’ensemble de la communauté africaine et internationale a pris la parole pour dénoncer la non-inclusivité du double scrutin et recommandé son annulation ou son report, le temps de mener le dialogue nécessaire à la bonne organisation. La CEDEAO a refusé d’envoyer une mission d’observation, et dans la foulée, l’UE annonçait que « les conditions d’organisation d’un scrutin sérieux et apaisé, dont le résultat puisse être accepté par tous, ne sont actuellement pas réunies ». Dans la même veine, le Nigéria, l’ONU ou encore l’Union Africaine s’exprimait pour tenter d’arrêter à temps ce scrutin.

Lorsque la communauté internationale fait front de façon unie de cette façon, c’est qu’elle ne lâchera pas de sitôt les responsables de l’organisation de ce scrutin. Ainsi, d’après de multiples sources diplomatiques à Bruxelles, Addis-Abeba et Washington, les sanctions suivront sans aucun doute si Alpha Condé maintient ces élections, ce qui semble se dessiner.

Quels fondements pour ces sanctions ?

Les bases juridiques justifiant ces sanctions sont claires. Pour l’UE par exemple il s’agit d’abord de faire respecter à la lettre l’Accord de Cotonou signé en l’an 2000 qui prévoit des sanctions en cas de violation des droits de l’Homme, de l’État de droit et de la démocratie. Au vu du caractère non-inclusif du scrutin, des multiples répressions violentes de manifestations, des emprisonnements d’opposants, les fonctionnaires de l’UE n’auront pas à chercher longtemps pour justifier les sanctions. Idem pour les États-Unis qui ont déjà une longue liste de dirigeants politiques sous sanctions, par exemple en RDC.

Quelles sanctions risquent ces dirigeants guinéens ?

Les États-Unis tout d’abord possèdent une arme redoutable avec le USD et pourraient geler les avoirs de certains responsables et les empêcher de traiter en USD, sans compter le blocage de l’attribution de visas. Déjà relevé par Guinée News, l’Union Européenne pourrait elle aussi bloquer les visas de certains, interdire aux familles de venir en Europe pour voyager, étudier ou même vivre. Quand on connaît le nombre de dirigeants économiques et politiques guinéens qui possèdent maisons, comptes en banque, familles et autres habitudes de shopping en Europe, nul doute que cela fera très mal.

L’ONU pourrait prendre des sanctions diplomatiques majeures également, au niveau de la représentativité du pays, voire de sa reconnaissance dans les instances internationales. L’isolation diplomatique de la Guinée serait donc sur la voie.

Le doute persiste sur l’action de l’UA, non habituée aux sanctions. Cependant, une source bien informée à Addis-Abeba nous a confirmé que pour le cas de la Guinée, et au vu des enjeux majeurs qui se profilent en 2020, l’UA pourrait, de façon exceptionnelle, prendre des mesures de sanctions extraordinaires.

Quelles personnalités dans le collimateur ?

C’est désormais LA question sur laquelle planchent les fonctionnaires internationaux de façon concertée.

Plusieurs dirigeants politiques et militaires sont actuellement sous enquête ; il s’agit notamment de : Malick Sankhon, le DG de la CNSS, Damaro Camara, le Général Bourema Condé, le Colonel Baffoe, Fabou Camara, le Directeur Général de la DPJ, Mohamed Diané, le Ministre de la Défense ou encore le Premier ministre Kassory Fofana.

Au niveau des acteurs économiques soupçonnés de soutenir Alpha Condé et même directement l’organisation du double scrutin, il y a le propre fils du Président, le célèbre Alpha Mohammed Condé. Certains dirigeants du secteur minier pourraient aussi être inquiétés comme le milliardaire d’origine libanaise Fadi Wazni dont l’entreprise SMB Mining vient d’obtenir de l’Etat les blocs 1 et 2 du gisement Simandou.

Nul doute que d’autres personnalités sont actuellement surveillées de près par les organisations régionales et internationales et que les prochaines semaines risquent d’être agitées en Guinée.

Source: https://blogs.mediapart.fr/