Situé en Afrique de l’Ouest entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire, la Guinée est devenue un partenaire stratégique de la Chine en Afrique de l’Ouest dans le cadre des « Nouvelles Routes de la Soie » en raison de l’importance de ses réserves minières. Le pays pourrait-il y perdre son autonomie ?

La Guinée est un pays à part en Afrique de l’Ouest. Sorti du giron de la Françafrique en 1958 avec une indépendance arrachée par Sékou Touré, le pays est en marge des réseaux régionaux traditionnels. Une situation à la frontière du pré carré français qui explique, en partie du moins, l’instabilité politique, sociale et économique qui caractérise le pays depuis les années 1960.

Mais la Guinée est également un pays disposant de ressources minières très importantes, dont les sous-sols sont beaucoup plus riches que ceux de ses voisins. Le minerai qui porte l’économie guinéenne est bien évidemment la bauxite, dont le pays est l’un des premiers producteurs mondiaux, mais la Guinée produit également de l’or, du fer et des diamants.

Toutes ces raisons justifient le fait que la Chine a, depuis de nombreuses années, placé la Guinée comme une de ses priorités géopolitiques dans la région et souhaite faire de Conakry l’une des portes d’entrée en Afrique de l’Ouest du mégaprojet des nouvelles routes de la soie, cher au président Xi Jinping.

Comme souvent en Afrique, la Chine a choisi d’opter en Guinée pour une politique volontariste de construction d’infrastructures pour poser pied dans le pays. C’est notamment le cas du barrage de Kaleta, d’une puissance de 240 MW, qui a été inauguré en 2015. Deux autres barrages hydroélectriques à Souapiti (550 MW) et à Amaria (330 MW) sont également en cours de construction par la Chine, mais leur production devrait être principalement réservée à l’industrie minière et notamment aux mines de bauxite, un minerai indispensable pour la fabrication d’aluminium (dont la Chine est le premier producteur mondial).

Pour leur réalisation, la Chine a octroyé des prêts colossaux à l’État guinéen. S’assurant ainsi la prise de contrôle de ces infrastructures en cas de défaut de paiement. De quoi interroger sur l’autonomie réelle de la Guinée, l’un des pays les plus pauvres au monde, vis-à-vis de son puissant allié, qui ambitionne quant à lui de devenir la première puissance mondiale. D’autant que le président Alpha Condé, de plus en plus contesté dans son propre pays, se montre plus que jamais dépendant de Pékin pour se maintenir au pouvoir.

L’intérêt de la Chine pour la Guinée et le développement de ses infrastructures de production d’électricité ne peut pas se comprendre sans mettre en avant l’importance pour Beijing de sécuriser ses approvisionnements en bauxite pour la production d’aluminium. Les groupes chinois obtiennent de plus en plus de concessions du minerai depuis plusieurs années et sont désormais en position de force dans l’extraction et l’export de la bauxite. Pas de quoi ravir la population guinéenne, qui a du mal à percevoir les contreparties de cette présence croissante de la Chine dans le pays.

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