La Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG) a célébré le 23 décembre 2020, le soixantième anniversaire de la création du franc guinéen. Une monnaie dont l’histoire est indissociablement liée au combat anticolonialiste et anti-impérialiste du pays.

Le franc guinéen a en effet été créé dans la douleur, à la faveur de l’exclusion du pays par la métropole coloniale française de la zone Franc CFA à la suite de son accession à l’indépendance le 2 octobre 1958. Cette exclusion va réveiller le nationalisme fondateur des dirigeants guinéens de l’époque sous le lead de Sékou Touré qui, dans la foulée, vont parvenir, avec le soutien du bloc de l’est, à la création de la monnaie ayant théoriquement une parité fixe avec le F CFA le 1er mars 1960, ainsi que de la Banque Centrale Guinéenne (BRG puis BCRG).

Le parcours de la nouvelle monnaie a été dans un premier temps marqué par les conséquences de la situation politique de la Guinée, à travers des manœuvres déstabilisatrices orchestrées par la métropole dans le but de faire chuter la monnaie indépendante. Le nouveau régime socialiste avait alors recours à la planche à billets pour financer les entreprises publiques. Cette époque d’inexpérience et de luttes libératrices est aussi marquée par une gestion alambiquée et peu orthodoxe qui va favoriser la dépréciation du franc guinéen face aux monnaies étrangères. Le passage de la monnaie “fière” au Syli entre 1972 et 1986 n’y fera rien.

Le deuxième régime civilo-militaire ne fera pas mieux. Après avoir abrogé le Syli pour un retour au Franc guinéen en 1986, la création des banques privées pour développer la politique monétaire va se heurter à une gabegie financière marquée par l’explosion des dépenses publiques et le recours incontrôlé à la planche à billets qui finiront par faire plonger définitivement le Franc guinéen. Selon un rapport de mission du FMI daté de 2008, ” la croissance du PIB a fléchi et l’inflation a atteint 39 % en fin d’année 2006, soit le deuxième taux le plus élevé en Afrique subsaharienne. La montée de l’inflation s’est accompagnée d’une dépréciation accélérée du franc guinéen” avec  par ailleurs une explosion record de la masse monétaire due à la planche à billets.

Les autorités actuelles tentent tant bien que mal de contrôler l’inflation galopante de cette monnaie (entre 8 et 10 %  depuis 2012), mais ces efforts sont souvent réduits à néant par le manque d’orthodoxie budgétaire, l’effritement des recettes fiscales à travers la corruption et le détournement des fonds publics, entre autres.

Aujourd’hui engagée dans la Zone Monétaire Ouest-africaine (ZMAO) qui s’inscrit dans le processus de monnaie unique de la CEDEAO dénommée ” l’ECO” qui devrait se substituer au “Franc CFA”, la Guinée qui est partisane pour rompre avec une monnaie africaine coloniale et sous tutelle de la France, devra en outre stabiliser ces indicateurs macroéconomiques pour s’engager du bon pied dans cette nouvelle aventure.