Ce 15 septembre 2021, la Chambre préliminaire I de la Cour pénale internationale (« la Cour ») a fait droit à la demande du Procureur d’ouvrir une enquête au sujet de crimes relevant de la compétence de la Cour qui auraient été commis sur le territoire des Philippines entre le 1er novembre 2011 et le 16 mars 2019 dans le contexte de la campagne dite de « guerre contre la drogue ».

Le 14 juin 2021, le Procureur a déposé une version publique expurgée de la demande d’ouverture d’une enquête, initialement présentée le 24 mai 2021, demandant l’autorisation d’ouvrir une enquête sur la situation aux Philippines, comme prévu à l’article 15‑3 du Statut de Rome.

La Chambre préliminaire I, composée du juge Péter Kovács, juge président, de la juge Reine Adélaïde Sophie Alapini-Gansou et de la juge María del Socorro Flores Liera, a examiné la demande du Procureur et les éléments justificatifs y joints. La Chambre a également examiné les représentations adressées par 204 victimes, conformément à l’article 15‑3 du Statut.

Conformément à l’article 15‑4 du Statut, la Chambre a conclu qu’il existe une base raisonnable pour ouvrir une enquête, notant que l’élément spécifique constitutif du meurtre en tant que crime contre l’humanité au sens de l’article 7‑1‑a du Statut est réalisé, s’agissant des meurtres commis dans tout le pays entre le 1er juillet 2016 et le 16 mars 2019 dans le contexte de la campagne dite de « guerre contre la drogue », ainsi que des meurtres commis dans la région de Davao entre le 1er novembre 2011 et le 30 juin 2016. La Chambre a souligné que, sur la base des faits tels qu’ils se dégagent à ce stade, et sous réserve d’une enquête en bonne et due forme et d’une analyse plus approfondie, la campagne dite de « guerre contre la drogue » ne peut être considérée comme une opération légitime de maintien de l’ordre, et les meurtres ne peuvent être considérés ni comme légitimes ni comme de simples excès dans le cadre d’une opération par ailleurs légitime. Au contraire, les pièces disponibles indiquent, au regard de la norme applicable, qu’une attaque généralisée et systématique contre la population civile a été lancée en application ou dans la poursuite de la politique d’un État au sens des articles 7‑1 et 7‑2‑a du Statut.

 

Les Philippines, État partie au Statut de Rome depuis le 1er novembre 2011, ont déposé la notification écrite de leur retrait du Statut le 17 mars 2018. Si ce retrait a pris effet le 17 mars 2019, la Cour reste compétente pour connaître des crimes qui auraient été commis sur le territoire des Philippines lorsqu’elles étaient un État partie au Statut de Rome, soit du 1er novembre 2011 au 16 mars 2019 inclus. Si les crimes considérés semblent s’être poursuivis après cette date, la Chambre a relevé que la demande présentée en vertu de l’article 15‑3 ne porte que sur les crimes qui auraient été commis pendant la période où les Philippines étaient un État partie au Statut de Rome et étaient tenues par ses dispositions.

CPI